Face au poids toujours plus important des places de marché et devant les nombreuses contraintes inhérentes à la création et l’animation d’un site marchand, on est en droit de se demander quel modèle est idéal en matière d’e-commerce. Tour d’horizon du marché, des solutions et des questions à étudier…

Le e-commerce en France et dans le monde

Le potentiel du e-commerce est indéniable : en France, 38,2 millions de personnes, soit 88,2% des internautes, ont déjà réalisé un achat sur Internet¹. L’an dernier, les ventes en ligne ont encore progressé de 13,4% et se sont réparties sur un plus de 200 000 sites marchands actifs².

Les principaux acteurs du e-commerce se sont orientés vers le modèle de marché, lancé en 2002 par Amazon, en ouvrant leur plate-forme à des vendeurs tiers et s’offrant ainsi une offre produit toujours plus large. Tant et si bien que les ‘marketplaces’ représentent désormais la moitié du volume des ventes en valeur dans le e-commerce international et 1/3 en France³.

En Chine, le groupe Alibaba truste à lui seul 80% des ventes en ligne du pays via son site marketplace TMall, devenu incontournable. Aux Etats-Unis, c’est le grand nombre de places de marché qui ressort. Et chez nous, la majeure partie des sites e-commerce dans le top 10 reposent sur ce modèle : Amazon, CDisount, Fnac, eBay ou encore OuiSncf (qui ne vend pas que des offres SNCF). Doit-on penser que l’hégémonie des places de marché dans l’hexagone va encore croître, à l’instar des exemples chinois et américains ?

 

Site marchand ou place de marché : les différents modèles

Pour les « petits vendeurs », bénéficier pour leurs produits d’une visibilité de plusieurs dizaines de milliers de visiteurs mensuels grâce à une place de marché est une aubaine. A tel point qu’aujourd’hui, un commerçant qui voudrait se lancer dans la vente en ligne a toutes les raisons de s’interroger sur la marche à suivre et la nécessité de créer son propre site Internet. Pourtant, le choix n’est pas évident.

Faisons le tour des solutions envisageables :

1. Créer un site avec une plateforme en mode Saas (software as a service) comme Shopify, Oxatis ou encore WiziShop ou Prestabox. Cet outil clé en main est accessible via un abonnement mensuel et vous donne accès à un package fonctionnel assez simple qui permet une prise en main aisée, sans connaissances en développement.

 

2. Déployer une solution e-commerce Open Source (Woo-commerce, Prestashop ou Magento). Ce dispositif requiert des connaissances techniques mais permet en contre-partie d’aller bien plus loin dans la personnalisation et le périmètre fonctionnel. Une condition pour se lancer : disposer d’une enveloppe budgétaire au démarrage. Le prix dépendant de la complexité du site à développer, on peut juste parler d’une fourchette moyenne (et large) comprise entre 5 000 et 50 000€.

 

3. Devenir vendeur sur une place de marché. Auquel cas il faut trouver la ou les plateformes adaptées et décortiquer leurs tarifs et commissions sur les ventes. Notez qu’il existe des marketplace B2C et B2B. Analysez bien les différents modèles. Ainsi chez Amazon vous avez le choix de gérer ou non les expéditions via les deux offres FBM ou FBA pour ‘fulfilled by the merchant’ ou ‘by Amazon’ (FBA).

 

Posez-vous les bonnes questions

Avant de foncer, mieux vaut baliser le terrain pour faire un choix éclairé. Voici quelques-unes des questions à se poser et points à étudier :

  • Est-ce une activité principale ou non ? Si vous possédez une boutique physique et que vous devez en plus gérer un site Internet, il faut prévoir une solution qui ne se révèle pas trop chronophage. Si vos clients sont des professionnels, Internet peut être un canal de vente et de prise de commande, incontournable auquel cas posséder votre propre site aura du sens.
  • Ensuite, je vous propose de réaliser deux prévisionnels (business plan). Le premier orienté sur la création d’un site intégrant notamment le coût de création, d’animation et la logistique. Autres dépenses à anticiper : votre salaire, les frais bancaires liés à un paiement en ligne, les pertes et casses de marchandise ou encore l’hébergement du site. Le second prévisionnel pourra simuler votre présence sur une place de marché avec les commissions. N’hésitez pas d’ailleurs à lire cet article assez complet au sujet des commissions par marketplace.
    Dans les deux cas, travaillez soigneusement l’étude des coûts d’expédition (emballage et affranchissement) car de nombreux services de ramassage ou de relais colis ne sont pas accessibles en deçà d’un volume journalier minimum. Et les tarifs étant dégressifs selon le volume, les petits commerçants paient ces services souvent plein pot. N’hésitez pas à recourir à un courtier en expédition comme Boxtal. Cependant ne perdez pas de vue que vous n’obtiendrez certainement jamais les conditions ultra négociées et compétitives des géants du e-commerce qui paient une somme dérisoire pour l’expédition d’un colis.
  • Posez-vous la question de la création de valeur. En effet, le développement d’une marque, d’une image sur un segment de marché ou encore d’un fichier client font certes l’objet d’effort au démarrage mais sont autant d’éléments valorisables. Or si ces éléments sont présents dans un modèle e-commerce indépendant, ils le sont beaucoup moins sur un modèle de place de marché, davantage axé sur le court-terme.
  • Les particularités de votre offre doivent naturellement orienter votre choix. S’agit-il d’un marché de niche ? Votre produit est-il consommé en one-shot ou peut-il faire l’objet d’une fidélisation client ? Peut-il faire l’objet d’un module de vente simple ou est-ce un produit très spécifique (sur-mesure, très petites séries, différents accessoires en option…) qui doit nécessiter un site sur-mesure ?
  • Avez-vous les moyens techniques, humains et financiers de faire vivre votre propre site (après sa création) : gérer la mise en ligne des produits, les expéditions, le SAV et le support client mais aussi déployer une stratégie de communication (emailing, réseaux sociaux, liens sponsorisés…) et optimiser le référencement naturel.
  • Prévoyez-vous un développement des ventes dans d’autres pays ? Le cas échéant, un site dédié devra faire l’objet de traductions soignées. Notez que le SEO d’un site français s’avère généralement un exercice hasardeux. Si vous optez pour le modèle place de marché, peut-être faudra-t-il identifier deux trois plateformes. La Chine par exemple peut faire rêver lorsque l’on sait qu’elle représente 50% du e-commerce mondial, d’autant qu’elle fait figure d’eldoro pour les produits made in France adulés des chinois. Encore faut-il en maîtriser les codes bien particuliers et composer avec Tmall qui détient 80% de parts de marché en e-commerce B2C.

 

Personnellement, je n’ai pas de conviction. Je prends le temps de conseiller chacun de mes clients en fonction de son propre contexte. Tout récemment, j’ai encore conseillé deux commerçants (du monde physique) de ne pas investir dans la refonte d’un gros site e-commerce mais plutôt de recourir à une solution en location. Même si je les considérais peu il y a encore un an, il me semble qu’elles sont de plus en plus professionnelles et peuvent dans certain cas amplement suffire. Concernant l’option ‘place de marché, je dois avouer que d’un point de vue marketing, c’est selon moi presque une hérésie pour un vendeur mais s’il s’agit d’une activité complémentaire pour lui, c’est un choix qui s’étudie.

Pour certains métiers, il existe également des solutions dédiées, développées pour répondre à des spécifications fonctionnelles bien précises. Il peut donc être intéressant de prendre le temps de les sourcer puis de les analyser.

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¹Source : baromètre du 4e trimestre 2018 de l’Observatoire des Usages Internet de Médiamétrie.

²Source FEVAD

³Top 10 des sites les plus visités en France (T4 – 2018) en nombre de visiteurs uniques mensuels

  1. Amazon — 30,90 millions
  2. Cdiscount — 20,96 millions
  3. Fnac.com — 17,92 millions
  4. Veepee (ex. Vente-privée) — 14,46 millions
  5. E.Leclerc — 12,44 millions
  6. Ebay — 12,37 millions
  7. Carrefour — 11,88 millions
  8. Oui.SNCF — 11,85 millions
  9. Booking.com — 11,79 millions
  10. Groupon — 10,78 millions